N°36 - Peut-on faire l'impasse sur les cadeaux sans être un affreux parent ?
“Celui qui a inventé la Noël, c'est un mec qui devait tenir un magasin.” Jean-Marie Gourio
👋 Salut Les petits résistants !
Nous y sommes, vous y êtes. Vous avez affronté les virus de novembre et la charge mentale de décembre. Ce soir, c’est les vacances des enfants. Gloire à vous, valeureux parents !
🧡 Noël arrive avec son lot de joies et d’étoiles. Mais entre les listes de cadeaux interminables, les vitrines étincelantes et les publicités omniprésentes, les parents finissent à bout de souffle. Pourquoi cette fête, autrefois religieuse, est-elle devenue le symbole d’une consommation effrénée ? Que révèle-t-elle sur nos rapports à l’enfance, à l’amour et à la consommation ? Décryptage avec Martyne Perrot, sociologue, ethnologue, et auteur de "Le cadeau de Noël, histoire d'une invention" (éditions Autrement).
Et puis, pour vous inspirer et vous permettre de lâcher, on a donné la parole à des parents qui font de la résistance sur les cadeaux à gogo et qui ne font de la place qu’aux souvenirs qu’ils se créent avec leur.s enfant.s !
Place au nouveau numéro. Bonne lecture à toutes et à tous ! Et surtout, surtout, de très belles fêtes de fin d’année à toutes et à tous. ❤️💚❤️
Au sommaire
Fofofocus : Noël et parentalité, je t’aime moi non plus
C’est vous qui le dites ! : témoignages de petits résistants
Le vrac d’actu
C’est cadeau : last chance
🗞️ Fo-fo-focus
Entre féérie et frénésie, Noël revient pour briller et nous challenger avec son lot d’injonctions, de charge mentale et d’overdoses de cadeaux.
“Noël : Pourquoi on se ruine en cadeaux ?”. Hop, plongée anthropologique dans nos rituels familiaux grâce à Martyne Perrot, sociologue, ethnologue, et auteur de "Le cadeau de Noël, histoire d'une invention" (éditions Autrement).
Une fête familiale héritée de l’histoire
Pour comprendre la manière dont les parents et les enfants abordent les cadeaux au fil des générations, et comment le consumérisme nous a façonné, il faut pour Martyne Perrot, remonter dans le temps.
Avant d’être cette fête où l’on s’échange des cadeaux, Noël était principalement une fête religieuse : point de cadeaux à tout va, les familles se retrouvaient à la messe de minuit. Mais au milieu du XIXème siècle, tout change. Avec l’essor de la bourgeoisie, l’enfant prend une place centrale dans la famille, et “le divin enfant” devient l’objet de toutes les attentions. Noël se transforme alors peu à peu en une célébration familiale où les cadeaux deviennent un rituel incontournable. Les grands magasins voient le jour à la même époque et installent des vitrines somptueuses pour attirer les enfants. Une stratégie marketing déjà bien ficelée !
Après la Seconde Guerre mondiale, Noël prend un virage plus consumériste sous l’influence du modèle américain. Le père Noël devient une icône universelle et les cadeaux s’imposent comme le cœur des festivités familiales.
Résister ou se conformer : un dilemme moderne
Comme le souligne Martyne Perrot, dans certaines familles, notamment les plus croyantes, les cadeaux restent encore aujourd’hui secondaires face au sens religieux de Noël. Mais pour beaucoup, il est difficile d’échapper à l’injonction sociale et au modèle qui s’est imposé : “Noël est la fête la plus conformiste de l’année.” Car même si les familles varient légèrement dans leurs traditions, le modèle des années 50 perdure : sapin décoré, repas (trop) copieux et ouverture des “jouets par milliers”, comme l’intime même Tino Rossi.
Ces dernières années, à la faveur des inquiétudes environnementales, des alternatives commencent à émerger : cadeaux faits main, expériences partagées, échanges symboliques… Des voix de parents s’élèvent pour dire stop et intimer l’ordre aux uns et aux autres (salut papy et mamie !) de faire moins ou autrement. Mais qu’on ne s’y trompe pas, cela demande souvent de déployer des trésors de pédagogie auprès des enfants… et des adultes. Finalement, résister demande un effort, là où la société nous pousse à la facilité. “J'ai tendance à penser qu'on a une culpabilité assez grande quand on limite les cadeaux, et cela rajoute de la charge mentale… surtout chez les mères”, souvent en première ligne pour l’organisation de Noël.
Autre enjeu et pas des moindres : le cadeau comme preuve d’amour. “Plus on dépense et plus on donne la preuve qu’on aime. Alors pour certains parents, il est symboliquement trop difficile de limiter ces cadeaux.”
Si vous vous retrouvez dans ces quelques mots, filez lire et écouter les témoignages de ces parents qui font autrement. Bougrement inspirant !
💭 C’est vous qui le dites !
On donne la parole à 3 parents qui ont décidé de pas se laisser faire avec les cadeaux par milliers ! Pour qui, pourquoi, est-ce que c’est fastoche de faire fi des injonctions et faire face aux réticents ? Micro tendu à Julie (fondatrice de Ohey) maman de 2 grands enfants de 12 et 18 ans, Nanja (fondatrice de Bleu Blanc Louve) maman d’1 grande fille de 8 ans et Clara (fondatrice de Crocomaman) belle-maman d’un garçon de 12 ans et maman d’Alice, 4 ans.
Le déclic ?
“Quand notre fille a fêté ses 1 an, j’ai demandé aux grands-parents de ne pas faire de cadeau parce qu’on n’avait besoin de rien. Ils n’ont pas pu s’empêcher d’offrir plusieurs cadeaux chacun. Résultat ? Une montagne de cadeaux qui ont fini au fond du placard ou chez Emmaüs. Et moi, j’ai vu que ce qu’elle avait préféré, c’était s’amuser avec les emballages. C’est à ce moment là que j’ai pris conscience que je ne voulais pas qu’on la gâte trop avec pleins de cadeaux “matériels”. Et j’ai instauré l’idée des cadeaux immatériels qui ne prennent pas de place à la maison. On s’y est tenus et je suis super fière de ça !” Clara.
“Deux raisons. La durabilité dans le souvenir d’abord : nous avons réalisé que notre fille ne se rappelait pas de qui lui offrait quoi lorsqu’elle avait entre les mains un cadeau matériel. Au contraire, un atelier partagé, un petit voyage, marquent vraiment. Ensuite, l’écoresponsabilité : marre de crouler sous les jeux ! Cela prend un temps fou de se débarrasser des jouets avec lesquels l’enfant ne joue plus et c’est aussi… un gouffre économique !” Nanja
Est-ce toujours facile ?
"Les enfants sont maintenant habitués à notre façon de faire, mais il y a eu des Noëls où ils voyaient les gros paquets des autres, et je sentais une petite déception. Ils ont pu avoir l’impression d’être moins gâtés que leurs copains quand les autres listaient fièrement tout ce qu’ils avaient reçu. Nous en parlions ensemble. Je crois que cela fait aussi partie de notre travail d’éducation que d’expliquer les valeurs que l’on souhaite leur transmettre : en l’occurence leur montrer que le plaisir ne se trouve pas dans l’accumulation.” Julie
Un conseil pour faire passer l’idée auprès… des enfants
Rendre l’attente magique : “Quand ils étaient petits, on ajoutait une touche d’excitation en comptant les jours. On disait : “C’est dans combien de dodos que l’on va voir ce concert ?” Ou encore “Est-ce qu’on prend nos tabliers pour cette activité ?” Ça les faisait rêver autant que des cadeaux physiques.” Julie
… et des autres ?
Passer le message en douceur : “Dans la famille, je partage cette approche sans en faire une injonction. Par exemple, ma belle-sœur a commencé à offrir des spectacles aux enfants, et je trouve ça génial. Je me dis que ça sème des petites graines. Je laisse aussi les grands-mères se faire plaisir avec un peu plus de générosité dans les paquets, c’est important pour elles.” Julie
“J’encourage les parents qui auraient du mal à se détacher du cadeau matériel à mixer les typologies de cadeaux en fonction des fêtes. Par exemple décider pour Noël de faire des cadeaux matériels, et pour l’anniversaire seulement des cadeaux immatériels.” Nanja
"Pour les anniversaires de leurs copains, on opte souvent pour des “bons pour” ou des créations faites maison. C’est un moyen de transmettre nos valeurs, sans être trop strict.” Julie
🦻 Le conseil de Clara à mettre dans les oreilles
Bilan enchanté
“Quand on vit le moment, ils sont toujours ravis. Ils s’en vantent aussi à leur manière auprès des copains : “Et toi, tu as déjà vu ce spectacle ? Moi oui, c’était génial !” On sait que ce qu’on leur offre, c’est une vraie bulle de qualité en famille. Cela leur montre que l’on est entièrement là rien que pour eux. Après des semaines chargées de travail, cela devient un rituel précieux.” Julie
“Je ne retiens de ce choix que du positif ! C’est d’abord très satisfaisant d’être alignée avec ses convictions personnelles écologiques. C’est aussi merveilleux pour ce que ça crée de connections et de liens entre les membres de la famille.” Nanja
🦻 L’essai transformé de Clara à mettre dans les oreilles
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🗞️ Le vrac d’actu
Un condensé d’infos engagées à consommer sans modération.
👉 Une scène de la bande dessinée “Adélidélo” a récemment suscité une vive réaction de la part de militants pour la protection de l’enfance, poussant Pomme d’Api à présenter ses excuses. Dans cette scène, le père Noël confie un secret à la petite fille en lui disant : “Tu ne vas rien raconter du tout, c’est un secret… Tu sais garder un secret ?”.
Pour les militants, cette mise en avant de la notion de secret dans une histoire pour enfants est problématique. Ils rappellent que le “secret” est fréquemment utilisé dans les affaires de violences sexuelles impliquant des enfants, et qu’il est essentiel de ne pas banaliser cette notion.
Un rappel important, à enseigner à tous les enfants :
👉 “Les filles en font plus que les garçons” à la maison, selon une étude1 sur la répartition des tâches domestiques chez les enfants de 10 ans. Le pourquoi du comment ?
“C’est le miroir de ce qu’on observe chez les adultes”. Autrement dit, quand papa regarde Netflix pendant que maman vide le lave-vaisselle, ça imprime.
La résultante des “représentations genrées dans la société”. Autrement dit, les Barbies qui cuisinent ou s’occupent des bébés, pendant que les figurines de superhéros sauvent le monde, ça laisse des traces.
70 % des filles aident au linge, contre seulement 50 % des garçons.
🎁 C’est cadeau !
Parce que vous avez mieux à faire que des recherches Google, j’ai sélectionné pour vous des idées cadeaux... de dernière minute !
Pour les retardataires qui veulent quelque chose à présenter au pied du sapin, ceux qui n’ont plus d’idées et qui ne veulent pas acheter pour acheter, voici des idées cadeaux à dégainer dans la dernière ligne droite et qui ne finiront pas au fond d’un placard ! On a glissé des idées de magazine parce que quand il s’agit de lecture c’est no limit, non ? ;)
👉 Pour se créer des souvenirs
un bon pour un livre de naissance personnalisé par Bam badam.
un film réalisé à partir des vidéos de vos téléphones par Crocomaman.
Wecandoo ouvre les portes de plus de 3 500 artisans qui partagent avec vous leur passion et vous offre une expérience unique : des ateliers originaux desquels on repart avec un objet fabriqué de nos propres mains. Pour petits et grands.
et pêle-mêle : une place pour une pièce de théâtre, un concert, une après-midi poney, un escape game entre cousins, un massage mère-fille, etc.
👉 Pour de la lecture dans le 1 000
outre les magazines Bayard Jeunesse et Milan Presse que l’on connaît tous, d’autres magazines publiés par des entreprises de presse indépendantes : Sporteen (le magazine sur le sport pour les ados de 10 à 15 ans), Otaku Manga (le premier magazine manga pour les ados de 10 à 17 ans), Tchika (le premier magazine d’empowerment des filles de 7 à 12 ans).
la gazette des enfants espions de 7 à 12 ans par Enquête en cavale.
Suite au prochain numéro !
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Étude sur la répartition des tâches domestiques chez les enfants de 10 ans, publiée par l’Institut national d’études démographiques (Ined) le 18 décembre 2024.